La société de masse, 2013, peinture acrylique sur toile, 130x162cm
Comment appeler ce grand
mythe nouveau de l’humanité planétaire interactive à la conquête d’elle-même dans
le cybermonde du web planétaire ? Nous le nommerons l’hyperhumanité. Hyper parce
qu’il se constitue par multiplication des liens numériques, les
hyperliens ; hyper aussi pour souligner l’émergence d’une conscience augmentée en
temps réel de cette masse réseautée d’êtres humains en quête de son unité par-delà
les distances géographiques s’abolissent aujourd’hui dans le respect de sa
diversité culturelle et linguistique.
Nous avons entrepris de
tisser des hyperliens de plus en plus serrés sur la toile numérique qui
recouvre peu à peu toute la Terre. Sur ce vaste réseau technologique, que
relient les fibres optiques, les satellites, les serveurs, les routeurs, les
modems, les ondes courtes et les terminaux, fixes et mobiles, nous nous sommes
mis à communiquer en temps réel, en tous sens, sans cesse et avec tous. La
société de la communication planétaire interactive s’est répandue comme l’eau,
comme une crue nourricière sur les vastes solitudes et les déserts
d’incompréhension de la Terre. La société de l'information est née. Elle nous
enthousiasme légitimement. Elle fait circuler sur ses larges bandes et à haute
vitesse des milliards de données, de pages web, de fichiers de tous ordres,
d’images et de messages interpersonnels vocaux, ou textuels, touchant à toutes
nos activités humaines publiques, professionnelles et privées.
Et quelles que soient les
fractures, les divergences, les luttes persistantes, voire exacerbées, qu’on
observe dans le web, nous ne pouvons en nier pour autant la dynamique
intégratrice, encore plus puissante. Nous voyons apparaître une société de masse numérique, planétaire,
qui oscille entre le fantasme d’elle-même et son incarnation réelle. Et nous
aimons ce corps lumineux irradié, euphorisant, maternel.
Ces liens hyperactifs
renvoient à une nouvelle solidarité, une sorte de gigantesque corps social
virtuel, une humanité numérique à laquelle nous aspirons tous à nous lier,
comme en témoigne le succès spectaculaire des médias sociaux. Nous y
multiplions les amis, nous recherchons cette chaleur humaine qui nait des
clavardages et du web interactif. Nous développons avec ce corpus numérique des
relations intenses, qu’elles soient utilitaires ou émotives.
Cette
nouvelle réalité est certes technologique, mais elle devient organique par les
comportements humains qu’elle induit. Imaginairement nous hypostasions les
réseaux numériques, qui ne sont qu’une technologie extensive, et leur
attribuons une réalité supérieure à nous et au codage binaire qui les fonde,
sous la forme d’un être réel auquel nous donnons des attributs susceptibles de
répondre à nos désirs, à nos besoins, et de compenser nos manques et nos
frustrations d’ici-bas. Nous sommes socialement enclins à ce type de fantasme,
puisque c’est ce que nous faisons déjà depuis des millénaires en imaginant un
dieu qui existerait réellement, puisqu’il nous rassemble dans son Eglise.
Ce concept de conscience augmentée, que je propose avec insistance depuis quelques années, et qui me paraît plus important pour notre avenir que le concept de réalité augmentée, parce qu'il est le fondement de l'éthique planétaire de l'hyperhumanité, il est manifestement moins populaire parce qu'il parle de cette accumulation de liens humains qui le fondent et non d'innovation technologique susceptible de rentabilité commerciale, mais il est la résultante historiquement la plus importante de la révolution numérique dans laquelle nous sommes engagés. Espérons qu'il prendra sa place bientôt dans le vocabulaire du XXIe siècle.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire