Certes, l’attrait irrésistible que nous
éprouvons pour ces liens numériques semble nouveau. Mais il ne fait que
refléter l’expérience du nouveau-né dans le carré parental et la durable nostalgie organique et psychique que nous
éprouvons inconsciemment depuis la séparation de la naissance, lorsque le cordon
ombilical a été coupé. Chacun ressent le désir d’être
rebranché, au point où cette connexion évoque le cordon ombilical du fœtus par
rapport au placenta. Nous l’appellerons « ombilical numérique ». Le
web devient alors un ersatz du corps maternel. La croissance personnelle, la
satisfaction physique et psychique passent par lui. La métaphore organique de
la nature vaut aussi pour la communauté humaine, à laquelle on ressent ce
besoin sécuritaire d’appartenance, et dont on ne supporte pas d’être exclu. Le succès
des réseaux sociaux amplifie l’importance de cet imaginaire. Les hyperliens
qu’on évoque métaphoriquement à propos de la navigation sur le web sont des
liens électroniques de point en point sur les réseaux, certes, mais ce sont
aussi des liens affectifs, car ils participent eux-aussi de ce besoin
psychique, de cette soif inextinguible de solidarité organique et non pas
seulement mécanique, selon la différence proposée par Durkheim, que nous
ressentons comme atome social isolé dans la masse.
Le
mythe élémentaire de l’unité perdue est déterminant dans l’image du monde que
crée chaque enfant. Il perdure et suscite encore chez l’adulte de fortes
représentations compensatrices qui détermineront ses comportements et ses
désirs fondamentaux.
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