2011-04-11

Poètes twitters, à vos claviers!

La règle des 140 caractères qu'impose Twitter vaut bien celle du code poétique classique. Je n'irai pas jusqu'à dire que le tweet devrait rivaliser avec "L'art poétique", tel que le prescrivait Boileau! Les plus grands poètes se sont certes libérés des contraintes du code poétique, lui préférant souvent la liberté de la prosodie. Mais il me semble que la métrique du Tweet, même si elle est beaucoup plus flexible que les règles de l'alexandrin ou du quatrain, ne manquent pas d'intérêt. Plutôt que d'en faire une limite au sens d'une contrainte frustrante pour ceux qui veulent communiquer toujours plus, la loi du genre qu'impose Twitter pourrait nous suggérer une nouvelle créativité.
Admettons-le: ceux qui twittent n'ont dans la majorité des cas rien d'intéressant à dire. Ils éprouvent plutôt une démangeaison communicative, une soif de téter la mamelle de la société ou de donner la tétée aux abonnés pour compenser des frustrations et des solitudes qu'ils ne sauraient davantage élaborer. Il serait donc souhaitable de s'imposer plus d'exigence, plus de rigueur, tant dans la qualité formelle de l'expression que dans l'intérêt du contenu.
Je veux bien croire que le tweet, comme le "texto" du téléphone cellulaire, soit plus un mode de communication quasi orale qu'un exercice de style. On ne saurait nier l'importance vitale du vent de la parole. Et je sais que la mode est à communiquer pour communiquer. Je ne doute pas de l'intérêt d'énergiser le lien social, et ce serait là la force du tweet, tandis que le message lui-même ne compterait plus pour grand-chose. J'ai lu cela chez McLuhan et dans les exclamations de plusieurs champions actuels du genre. Je demeure pourtant convaincu que l'un n'empêche pas l'autre, et même que l'intérêt du contenu peut contribuer à renforcer beaucoup plus le lien social! Ceux qui parlent d'"esthétique de la communication" ne tomberont sans doute pas assez bas pour dire que ce que l'on communique importe finalement peu.
Il demeure qu'en prose ou en vers, et sans créer une Académie du tweet, on peut souhaiter une amélioration du genre qui en assurera le respect et peut-être même la pérennité. Faute de quoi, le ramollissement du tweet - nous ne sommes pas tous les jours dans une révolution arabe du jasmin, on ne trouve pas tous les jours une information d'intérêt mondial à diffuser avant les autres - fera sombrer ce nouveau mode d'expression dans une banalité et une médiocrité fatales.
Alors, pourquoi pas des poètes qui twittent et nous envoient en quelques mots des éclats de poésie intense, vertigineuse ou onirique, tranchante ou métaphysique, émotive ou sibylline?
Un nouveau genre artistique à créer, en saisissant l'effet de mode de Twitter pour lui donner force culturelle.
hf

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