Cyberespace, peinture acrylique sur toile, 91x153 cm, 1999
Chacun veut être branché,
connecté au web qui devient alors un ersatz du corps maternel. Ce branchement évoque
le cordon ombilical du fœtus par rapport au placenta et réactive la
nostalgie biologique que nous en gardons. Cette connexion numérique joue
véritablement le rôle d’un cordon ombilical avec le corps social, au
point où nous l’appellerons un « ombilical numérique ». La vie, la
croissance personnelle, la satisfaction physique et psychique passent par lui. La
métaphore organique de la nature vaut aussi pour la communauté humaine, à
laquelle on ressent ce besoin sécuritaire d’appartenance, dont on ne supporte
pas d’être exclu. C’est bien en ce sens qu’on parle de solidarité organique plutôt que seulement mécanique, selon la différence
proposée par Durkheim. Le succès des réseaux sociaux amplifie l’importance de
cet imaginaire. Tous les hyperliens qu’on évoque métaphoriquement à propos de
la navigation sur le web, ce sont des liens électroniques de point en point sur
les réseaux, certes. Mais ils participent aussi, imaginairement, de ce besoin psychique, de cette soif
inextinguible de liens, d’appartenance que nous ressentons comme atome social
isolé par rapport au Tout social.
Certes, l’attrait irrésistible
que nous éprouvons pour ces liens numériques semble nouveau. Mais il ne fait
que refléter l’expérience du nouveau-né dans le carré parental, cette structure
élémentaire bio-sociale sur laquelle la mythanalyse fonde l’origine des mythes :
les liens du nouveau-né avec la mère, le père et l’autre (la société). Le mythe qui sous-tend cette importance des
hyperliens et de l’ombilical numérique, n’est qu’une nouvelle déclinaison de ces
liens, dont Confucius faisait une interprétation du monde et une morale sociale
dans la Chine ancienne, et qu’on retrouve encore diversement dans plusieurs
mythologies, comme celle des Maori polynésiens.
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