Les polices souhaiteraient insérer ce genre de puce invisible, mais dotées d'un émetteur radio ondes courtes lisibles par des bornes à courte distance, voire dotées d'un dispositif de traçage GPS par satellite, non seulement dans nos passeports ou permis de conduire, mais aussi sous la peau de prisonniers en liberté surveillée. On y penserait aussi pour la sécurité des enfants, pour la surveillance des oeuvres d'art, des objets précieux, ou de votre laptop, etc. Bref, les Digital Angels - ces anges gardiens numériques, selon le nom même d'une compagnie américaine qui les manufacture -, permettraient le traçage perpétuel de tout objet ou personne que l'on veut contrôler ou protéger.
S'il s'agit de vous assurer de toujours retrouver votre petit chien ou votre chat, pourquoi pas? Pour assurer le traçage de la viande de boucherie, et le contrôle de la chaîne du froid dans l'industrie alimentaire, pour protéger des malades de l'Alzeimer, des personnalités susceptibles d'être kidnappées, des soldats sur les sites de guerre, pourquoi pas! S'il s'agit d'en mettre partout, y compris dans vos cartes de crédit, d'identité, et vos cravates ou vos chaussures, il est évident que nous rencontrons là un grave problème dans notre future démocratie numérique. Leur invisibilité envahissante et leur puissance potentielle leur promettent un succès dont les effets pervers sont appelés à soulever un débat de société majeur. Les puces espionnent deviennent un symbole de l'âge du numérique.
Le philosophe utilitariste Jeremy Bentham avait inventé un modèle de prison circulaire contrôlable par un seul gardien, situé au centre de l'édifice dans la pénombre. La version moderne et numérique du Panopticon - (du grec voir partout) devient redoutable. George Orwell, avec 1984 ou Animal Farm a déjà romancé ce cauchemar. Katherine Albrecht et Lyz McIntyre, les deux auteurs du livre Spychips, dénoncent tous les abus auxquels nous devons nous opposer d'autant plus que ces puces à ondes courtes sont extrêmement envahissantes. Ces deux femmes combatives ont aussi fondé CASPIAN (Consumers Against Supermarket Privacy Invasion and Numbering is a grass-roots consumer group fighting retail surveillance schemes since 1999. With thousands of members in all 50 U.S. states and over 30 countries worldwide, CASPIAN seeks to educate consumers about marketing strategies that invade their privacy and encourage privacy-conscious shopping habits across the retail spectrum). Il semble que cette technologie soit déjà utilisée très officiellement dans beaucoup de pays et que des grandes surfaces commerciales la teste aussi, par exemple pour installer des caisses qui débitent automatiquement votre compte bancaire sans vous arrêter à la sortie, ou pour développer du datamining de nos comportements d'acheteurs. Bref, les codes-barres cèderaient bientôt devant le progrès des RFID.
Voilà donc une avancée technologique majeure, qu'il ne faut pas diaboliser, mais connaître et réglementer légalement, comme le font déjà certains pays, sur laquelle réfléchissent des commissions publiques, aux États-Unis comme en Europe, et à laquelle il serait grand temps que les artistes intéressés par les technologies numériques consacrent aussi leurs réflexions et leur créativité. Ces puces, dans un circuit de bornes récepteurs sur un espce scénique, permettent d'animer des jeux d'éclairage, de sons, selon les déplacements des danseurs ou des acteurs. Il y a là toute une recherche et des usages artistiques intéressants qui s'annoncent. Et aussi, nous espérons voir se lever les George Orwell du numérique, qui sauront éveiller notre conscience critique face à ce nouveau Big Brother invisible que plusieurs voudraient cloner partout dans nos espaces urbains pour les transformer en un redoutable Panopticon numérique. (Hervé Fischer)
2007-05-23
Le Panopticon numérique
Les puces espionnes - Radio Frequency Identification Devices - intéressent de plus en plus les polices et les compagnies de commerce de détail. Elles seraient appelées à remplacer les codes-barres, aujourd'hui si répandus dans le monde entier, que nous retrouvons sur tous les objets du commerce, les livres comme les paquets de pâtes, mais aussi à l'hôpital sur notre dossier, pour faire un suivi par ordinateur et éviter les erreurs de médicaments ou... de chirurgie!

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