2007-05-17

Corps humains plastinés


Les plastinations de cadavres humains réalisés par Gunther von Hagens constituent un événement considérable. En visitant cette exposition présentée actuellement au Centre des sciences de Montréal, je suis fasciné par l'extraordinaire complexité, l'intelligence et la réussite dont témoigne l'évolution du corps humain. Là comme en beaucoup d'autres domaines, là plus qu'ailleurs en ce qui concerne notre cerveau, la nature atteint un degré de perfection qui laisse très loin derrière tous nos projets de robots, de prothèses bioniques, de cyborgs, etc. L'être humain m'apparaît comme la tête chercheuse de l'intelligence qui anime la matière. Et nous devenons même capables de déchiffrer notre ADN, nos gènes et nos protéines et d'agir sur notre propre évolution.
L'exposition de Gunther von Hagens choque évidemment, parce qu'elle évoque d'abord la mort que nous redoutons tous: on nous montre des cadavres véridiques.Mais au-delà de cette première réaction, cette exposition n'apparaît pas morbide, car les corps plastinés nous sont présentés dans des attitudes de vie, celles de nos gestes quotidiens et même de sport intensif, et nous invitent à admirer la puissance et la merveille de nos corps. Rien de tel pour prendre conscience de notre privilège d'être en vie. .
Il s'agit d'une célébration de la nature et de la vie humaine. Les balbutiements critiques des gourous du posthumanisme apparaissent insignifiants par rapport à la puissance de la nature. Ce n'est pas demain que le silicium relèguera le carbone à la préhistoire de notre avenir. Ici, le silicium utilisé dans la plastination met au contraire en valeur la vie organique, biologique, et non pas des machines intelligentes ou spirituelles, comme en rêvent Ray Kurzweil et quelques autres gourous ingénus.
C'est une démarche artistique au sens fort du terme, parce qu'elle célèbre la créativité de la nature et de l'homme au sein de la nature. Elle rejoint à sa manière ce que j'appelle les arts scientifiques dans leurs tendances extrêmistes, où cependant la vie l'emporte sur la morbidité et sur les lieux communs de la science-fiction.
Et ces corps plastinés nous inspirent même dans nos projets les plus créatifs, comme des modèles d'imagination et de réalisation.
Hervé Fischer

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