2008-05-23

De l’idéologie de l’avant-garde à celle de la créativité


Ler XIX siècle français a lancé l’idée d’avant-garde sociale et artistique, suite à l’invention de l’Histoire comme destinée préprogrammée du Progrès humain. Au début du XXe siècle, des artistes ont substitué à ce concept d’Histoire téléologique, écrite d’avance, la célébration de la liberté humaine, celle qui est capable de construire le futur. Ce furent coup sûr coup les arrogances et les vertiges du futurisme italien, du constructivisme russe et du Bauhaus allemand. Ces trois mouvements artistiques, s’inscrivaient cependant encore dans l’exaltation de l’avant-gardisme, comme conscience possible du futur. Les postures extrêmes des artistes dans les années 1980 et leurs crispations parfois morbides ont mis fin à la célébration de l’idéologie d’avant-garde, annonçant les émois du postmodernisme et la crise de la posthistoire (1).

Aujourd’hui, le contexte a changé et l’idéologie aussi. Nous ne parlons plus guère d’avant-gardisme, mais plutôt d’innovation et de créativité.

L’avant-gardisme a pris paradoxalement une coloration ringarde, comme le modernisme et même la crise postmoderne. Ils ont vieilli très rapidement, parce que les enjeux sociaux ont été bouleversés par le passage à l’âge du numérique.

Aujourd'hui, nous avons conçu un bouquet de concepts proches qui sont l'innovation, la créativité, la recherche artistique; nous parlons d'artistes chercheurs, et nous tentons de rapprocher et mêler ces concepts le plus possible. En fait l'innovation renvoir plutôt à la technologie; la créativité aux sciences cognitives, la recherche artistique aux sciences pures. Nous tentons, légitimement de réunir ces vertus, mais dans une posture idéologique qui s'éloigne manifestement de l'idée d'avant-garde.

L’avant-gardisme était individualiste, subjectif, alors que la créativité se déclare collective et objective. L’avant-gardisme produisait des oeuvres uniques, alors que la créativité cible la production industrielle et sociale. L’avant-gardisme était linéaire, alors que la créativité se réclame de l’arabesque, de la sérendipité et des logiques floues. L’avant-gardisme était spécialisé et autoritaire, alors que la créativité exige la transversalité, la multidisciplinarité, l’ouverture. L’avant-gardisme était simplificateur, affichait des manifestes prescripteurs et souvent binaires, alors que la créativité s’identifie à la recherche, à la complexité, à l’inachevable et à une certaine modestie. L'avant-gardisme s'exprimait à coup de divergences, alors que la créativité cultive la convergence , celle de l'art, des sciences et des technologies. Certtes, l’avant-gardisme tendait à s’approprier des domaines réputés non artistiques et à les intégrer dans l’art, qu’il s’agisse de l’âme, des matières pauvres, de gestes et d’attitudes, de la vie, de la société, de la politique, mais soulignait le saut qu'il opérait. Après avoir inventé le ready-made, Marcel Duchamp avait même choisi de faire de sa vie elle-même une oeuvre d’art. L'avant-gardisme pratiquait la rupture, alors que la créativité amalgame et vise l'approfondissement. L’avant-gardisme était le plus souvent socialement contestataire, critique, politiquement engagé, alors que la recherche créativité se rapproche de l’industrie manufacturière et culturelle et des usages sociaux, perdant ainsi le plus souvent son statut de conscience sociale critique.

Passer d’une idéologie à une autre, dans le domaine de l’art, ne signifie pas un progrès objectif, mais un changement significatif d’idéologie, reflet d’un changement de société et d’image du monde. L’avant-gardisme était provocateur, gratuit et simplificateur, libertaire et excitant. La créativité relève d’une idéologie plus ouverte, mais molle et souvent insaisissable, plus engagée et empêtrée dans les compromis et les gestions institutionnelles et sociales. Plus utile, avec plus de convivialité obligée, mais moins de conscience philosophique et critique. Je ne prendrai donc pas ici parti pour la créativité contre l’avant-gardisme. Il s’agit seulement de clarifier la topologie idéologique dans laquelle nous évoluons et nous engageons éventuellement. Mais comment pourrait-on être d’avant-garde dans les arts numériques? Technologiquement innovateur, certes, comme dans les jeux vidéos et les installations interactives, le divertissement. Et plutôt d’avant-garde dans le bioart, l’art éconumérique. Car la créativité, la recherche innovatrice ne font pas l’art. L’art s’y perd souvent.

Certes, art, science et technologie se sont rapprochées. Ces proximités sont passionnantes et fécondes. Mais il demeure que l’art est dans la tête de l’artiste, pas dans l’ordinateur. Dans l’attitude, pas dans la science. Dans la divergence, pas dans l’algorithme.

Hervé Fischer

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(1) Voir aussi Hervé Fischer : L’Histoire de l’art est terminée, Balland, Paris, 1981. En ligne maintenant à : http://classiques.uqac.ca/contemporains/fischer_herve/histoire_art_terminee/histoire_art_intro.html

2008-05-21

Pour un art éconumérique


Deux des paramètres les plus déterminants de notre sensibilité contemporaine, en ce début de XXIe siècle, sont certainement l’économie et l'écologie. Et ils ont convergé dans l’exploration et l’interprétation de notre cosmogonie, qui est devenue numérique, après avoir été animiste, providentielle, organique et mécanique. Tel est le changement d’image du monde qui s’impose aux artistes actuels.

Mais de quel art pourra-t-il s’agir? Nous avons déjà exploré notre rapport à la nature dans la peinture de paysage, la sculpture environnementale, le land art, ou des performances écologiques, panthéistes, sociologiques, ou dénonciatrices. Les artistes négligent le thème de l’économie, jugée à tort inesthétique et triviale, mais ils ne peuvent bouder plus longtemps l’écologie. Celle-ci a certes motivé l’engagement politique de nombreux artistes, mais pas l’exploration de son nouveau langage. Or c’est l’écologie aujourd’hui, qui détermine de plus en plus notre conscience et notre perception de la nature, et qui nous sensibilise aux causes et aux effets des bouleversements climatiques. Or l’écologie est une science, dont les modes de représentation numérique suggèrent une nouvelle expressivité artistique de la nature et une nouvelle esthétique.

Les romantiques ont inventé le sentiment de la nature. Les peintres impressionnistes ont découvert le plein air, la composition des paysages, la lumière naturelle et la synthèse visuelle des couleurs pures. Mais ce n’est plus la destruction de l’espace optique, en perspective euclidienne, au bénéfice d’une arabesque, qui appellera l’attention des paysagistes numériques. Notre vision actuelle de la nature s’élabore selon d’autres structures, qui sont des courbes de variations quantitatives. L’architecture numérique de notre image du monde se construit aujourd’hui en diagrammes, en déploiements ondulatoires, en fréquences radio, en mouvements de particules, selon la dynamique des fluides et les lois de la probabilité. La connaissance des causes et des effets des phénomènes naturels est constituée désormais de fichiers informatiques. L’analyse des facteurs physiques, chimiques, biologiques, humains de notre environnement trouve son expression dans des modélisation, des simulations, des prévisions, qui relèvent désormais d’algorithmes écologiques. C’est là aussi que l’évolution des biomasses et les variations des gaz à effet de serre, de l’ozone, de la fonte des glaces polaires, du plancton, selon les températures et les cycles, peuvent être suivies et interprétées. Les déplacements et la teneur des polluants, les courbes des températures océanographiques, des champs électromagnétiques, des zones de désertification, les migrations animales, les déforestations, les croissances démographiques et urbaines, les niveaux d’eau des océans sont autant de paramètres qui modèlent nos paysages, nos environnements, notre géographie humaine, la météorologie de nos vies quotidiennes et provoquent maintes catastrophes naturelles de plus en plus tragiques.

Ce ne sont plus les vibrations chromatiques éphémères, si chères aux Impressionnistes, qui importent aujourd’hui. Ce n’est plus la complémentarité des couleurs et les lois chromatiques de Chevreul. Car c’est en fausses couleurs, déterminées par des codes de stricte lisibilité, que notre nouvelle naturalité (1) s’affiche aujourd’hui sur nos écrans cathodiques. Les impressionnistes ont détruit les conventions classiques du clair-obscur et de la vraisemblance. Mais nous avons réinstitué aujourd’hui de nouvelles conventions, soumises à des codes internationaux de normalisation, qui sont celles de l’imagerie scientifique. Elles ne relèvent même plus d’une symbolique religieuse. À l’opposé de toute subjectivité psychologique, de toute rébellion individualiste, de toute sentimentalité, elles sont plus rigides et transculturelles que jamais. Elles visent seulement la commodité utilitaire, signalétique d’un langage sans ambiguïté.

Nous ne nous intéressons plus, non plus, au relativisme de nos perceptions qu’explorèrent les Cubistes. Nos images de la nature sont scientifiques. Elles sont basées sur des mesures et des relevés statistiques. Elles sont le pur produit de nos appareils électroniques et de nos programmes informatiques. Elles renouent donc, à l’opposé du langage subjectif des Cubistes, avec les mathématiques qui furent la base, au Quattrocento, de notre perception optique de la nature et de l’invention de la perspective géométrique. Elles visent plus que tout, à nouveau, l’objectivité.

Une attitude demeure cependant commune aux artistes impressionnistes et à ceux qui s’engageront dans l’art éconumérique : une attitude politique. Les Impressionnistes sont fils de la Révolution française. Opposés aux aristocrates et aux bourgeois qui défendaient le néo-classicisme, ils se sont identifiés au peuple, celui des paysans et des ouvriers. Ils ont représenté la vie quotidienne des gens ordinaires. Ils furent sensibles aux nouvelles théories socialistes et anarchistes. Ils soutinrent la révolte des Communards. Ils avaient des préoccupations à la fois esthétiques et politiques. Il en sera de même des artistes éconumériques. Non seulement l’écologie nous donne accès à une nouvelle lisibilité des phénomènes de la nature, mais elle suscite aussi une prise de conscience des effets pervers de notre économisme obsessif et de la logique abusive de nos sociétés de consommation.

Cependant, ce n’est plus l’expression des joies populaires du plein air ou de la souffrance des prolétaires qui retient notre attention. C’est beaucoup plus l’appauvrissement des sols, et la pollution de l’air, parce qu’elles créent la pauvreté et la souffrance des hommes. Ce sont les OGM et les monocultures qui ruinent l’agriculture alimentaire. Ce sont les gaz à effet de serre qui déclenchent des bouleversements climatiques et des catastrophes humaines. Ce sont les déversements de polluants, la contamination de notre alimentation industrielle, qui tuent, et qui vont diminuer sans doute à nouveau notre espérance de vie, au moment où elle aurait pu s’accroître encore. Ce ne sont plus nos technologies numériques, mais nos logiques économiques néo-libérales, qui désormais ravagent de plus en plus notre planète et détruisent les fragiles équilibres écologiques dont dépend notre survie. L’engagement écologique implique la dénonciation du cynisme économique.

Voilà donc tout un défi pour les artistes actuels : découvrir notre nouvelle image du monde, économique et écologique; explorer sa nature numérique, et inventer les langages artistiques qui pourront exprimer notre nouvelle sensibilité. Plusieurs artistes ont déjà abordé significativement ces thèmes en élaborant des installations interactives et ludiques, en exposant des jardins contrôlés à distance par internet, ou en concevant des environnements miniaturisés célébrant une nature artificielle. Ce fut une étape. Mais c’est désormais en vraie grandeur, à l’échelle de la planète, que se situent les problématiques écologiques. Nous n’en sommes plus au jardin des curiosités, au gadget-robot, mais nous touchons à l’architecture planétaire.

Le défi est spécifique à l’âge du numérique. Pourtant, il demeure comparable à celui que relevèrent jadis les Impressionnistes, esthétique et politique. Et de même que les sensations de lumière et la conscience politique n’étaient pas dans les tubes de peinture ni dans la toile ou les pinceaux, mais bien dans la vision nouvelle des artistes, de même l’exploration et l’expression des défis du numérique ne sont pas davantage aujourd’hui dans les ordinateurs, ni dans les logiciels, mais bien dans la tête des artistes. L’expressivité du numérique ne se traduit pas nécessairement avec des outils numériques. Loin de là. Mais les thèmes et le défi, eux, s’imposent.

Hervé Fischer

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(1) À propos de la nouvelle naturalité ou de l’hypernature, voir mon blogue du 13.08.2007

Le numérique vert














On a souvent souligné que les nouvelles technologies sont beaucoup moins menaçantes pour l’environnement que les anciennes, qui étaient basées sur les ressources naturelles, l’énergie et les mines, et terriblement polluantes. L’esprit du temps aussi a changé, en raison de l’urgence créée par les bouleversements climatiques. Une encyclopédie participative Ekopedia (1), déjà en dix langues, tend à recenser et mettre en ligne les problématiques et les solutions écologiques auxquelles nous devrions tous prêter attention. Les communications par ordinateur, incluant les informations, les documents de travail, les courriels privés, et maintenant la généralisation électronique des billets d'avion, tendent à réduire l’utilisation du papier et contribuent à préserver des forêts. La publicité des manufacturiers canadiens nous montre des images emblématiques d’usagers d’ordinateur portable sur un ponton au bord d’un lac aux eaux pures. Et il convient de souligner ce que les industries douces de l’environnement doivent au numérique. On ne conçoit plus l’écologie sans l’imagerie scientifique numérique, qu'il s'agisse de la détection des variations de l’ozone, des relevés par satellite des densités de plancton dans les océans, des modélisations, des simulations, des capteurs fins de pollution dans l’air, etc. qui seraient impensables sans les ordinateurs et les logiciels sophistiqués auxquels on recourt désormais quotidiennement. Nous usons d’algorithmes écologiques, par exemple pour suivre l’évolution de la biodiversité et évaluer les impacts conjugués des divers paramètres humains, biologiques, météorologiques (2). Non seulement les nouvelles technologies sont douces, mais le numérique vert nous aidera peut-être à sauver les écosystèmes fragiles de la nature. À cet égard, le rapport traditionnellement conflictuel entre technologie et nature s’est en partie inversé.

Une électronique verte?

Mais peut-on parler aussi d’électronique verte? Certes, nous usons de thermostats pour mieux contrôler nos usages énergétiques. Mais s’il est vrai que quinze ordinateurs fonctionnant en même temps, ou que nous avons l’habitude de laisser ouverts, créent autant de gaz à effet de serre qu’une voiture moyenne, comme le souligne la publicité d’un logiciel qui prétend contribuer à sauver la planète (3), nous allons certes devoir changer nos habitudes laxistes en éteignant les ordinateurs inactifs. Déjà Google a décidé de se mettre au vert et d'investir dans les énergies renouvelables en soulignant qu'il était gros consommateur d'électricité avec ses multiples serveurs géants." Les quantités d'énergie que les ordinateurs consomment dans le monde sont énormes. Notre but est de les réduire ", selon Nelson Mattos, vice-président de la recherche et développement (R & D) pour l'Europe chez Google. Mais il y a bien pire : nous produisons entre 20 et 50 millions de tonnes de déchets électroniques chaque année dans le monde, selon le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE). Nos sites d’enfouissement s’emplissent désormais d’équipements électroniques, téléviseurs, ordinateurs, téléphones cellulaires que nous mettons au rebut, ce qui constitue une pollution électronique en croissance exponentielle et encore plus menaçante lorsque ces déchets sont incinérés. On a pu estimer que nous rejetons quelques 15 kg par personne et par an de déchets électroniques toxiques, non biodégradables, notamment du plastique, du plomb, du cuivre et du cadmium (4). Un pays comme la Chine, devenu principal manufacturier de ces équipements électroniques, a pris conscience du danger et propose aussi de récupérer tous ces déchets, rapatriés des pays clients, pour les recycler, notamment à Guyu, mais au prix de graves menaces pour la santé des ouvriers qui sont soumis aux émanations de ces matières toxiques (5). L’usage de plus en plus répandu de batteries, qui vont aussi être utilisées pour les voitures hybrides, augmente le défi (6). Le droit international oblige désormais chaque pays à traiter ses déchets dangereux sur son propre trerritoire.

Nous allons devoir donner une attention particulière à ces problèmes inédits, développer des ordinateurs biodégradables, apprendre à contrôler la récupération des composants polluants, apprendre à recycler ces équipements, notamment à des fins éducatives et de développement dans les pays démunis. Consommer et jeter, l’axiome du capitalisme dit évolué, est devenu à l’âge du numérique une lourde menace écologique. C’est donc aussi un problème d’éducation et de gestion. Des organismes internationaux ont entrepris de vastes campagnes de conscientisation, notamment Greenpeace (7). L’Europe, qui produit déjà annuellement quelques six millions de tonnes de déchets électroniques par an, a légiféré. Mais ses directives écologiques sont actuellement encore mal respectées. En Amérique du Nord, nous sommes à cet égard encore plus en retard qu’en Europe. Au Canada, Duncan Bury, du Bureau national de la prévention de la pollution, d’Environnement Canada souligne en 2008 que « nous devons nous attaquer à ce type de risque environnemental qui, bien entendu, n’existait pas il y a dix ans ». Il ajoute que: « Au Canada, selon nos estimations, quelque 158 000 tonnes de déchets électroniques sont éliminées chaque année et l’on s’attend à ce que cette quantité augmente de 30 % d’ici l’année 2010. Si rien n’est fait, nous verrons ce chiffre grimper continuellement, compte tenu des durées de vie du matériel et de l’arrivée constante de nouvelles applications, de plus grande ampleur » (8). Plusieurs organismes de lutte contre le pollution électronique existent au Canada, notamment Electronics Product Stewardship Canada (EPS Canada) (9).

Des artistes verts?

L’UNESCO a institué en 2007 un prix consacré aux arts numériques traitant de l’écologie (10). L’Observatoire Leonardo pour l’art, la technologie et la science (OLATS) s’intéresse aux thèmes du climat et soutient la diffusion du travail d’artistes numériques travaillant sur des thèmes écologiques (11). Admettons que ces artistes sont encore peu nombreux. On ne peut certes confondre écologie et morale (la vertu verte complique passablement les problématiques politiques de l’écologie, comme le souligne le philosophe français Bruno Latour), ni davantage art et morale (les bons sentiments ne font pas de l'art intéressant, pour paraphraser André Gide à propos de la littérature). Les beaux paysages ne traitent pas davantage la question. C’est donc un champ nouveau de création artistique qu’il faut envisager. Lucy Lippard, critique d’art renommée a organisé récemment une exposition intéressante au Boulder Museum of contemporary art - Colorado (12). Ecoarts propose un site en ligne, à vrai dire assez conformiste (13). Mais au-delà des déclarations d’intention ou des dénonciations, les chefs d’œuvre d’art numérique écologique ne courent pas encore la planète. Le Land art et les démarches de plusieurs artistes traitant du thème "art et nature" ont certainement déjà préfiguré des résonnances écologiques marquées. Mais elles ne recourent presque à une expression numérique de la nature, sauf peut-être dans le cas du japonais Masaki Fujihata qui lie des enregistrements video du paysage à son ascension du mont Fuji enregistrée sur un GPS (14). L'art numérique écologique est encore à inventer. Il reflètera directement les deux dimensions les plus marquantes de notre sensibilité en ce début du XXIe siècle. Le numérique est appelé à verdir davantage.
Hervé Fischer

(1) Voir : www.ekopedia.org
(2)
Voir : http://biodiversite.wallonie.be/outils/methodo/predictionpouruneespece.htm
(3)
Voir le site LocalCooling.com
(4) Voir : www.silicon.fr et beaucoup d’autres sites, tels que :
www.pcinpact.com/actu/news/Deux_directives_pour_reduire_la_pollution_electron.htm
(5)
Voir : http://www.lexpress.to/archives/1984/
(6)
Voir : http://www.chine-informations.com/actualite/chine-le-probleme-des-dechets electroniques_9314.html
(7)
Voir : En route pour une électronique verte, GreenpeaceFrance http://www.greenpeace.org/france/press/reports/enqu-te-en-route-pour-une-ele.
Voir aussi : http://technaute.cyberpresse.ca/200612/06/nouvelles/materiel-informatique/
12770-trop-dordinateurs-a-la-poubelle.php
et : http://afp.google.com/article/ALeqM5gbXfE883Kn14V10K1bf7ihonv89A
(8)
Voir : http://www.cec.org/trio/stories/index.cfm?varlan=Francais&ed=14&ID=157
(9)
Voir : http://www.epsc.ca et http://www.wired.com/science/discoveries/news/
2003/03/57990
On trouvera aussi des chiffres comparatifs pour différents pays, malheureusement déjà anciens, à : http://ewasteguide.info/international_e_waste_generation
(10)
Voir : http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.php-URL_ID=32309&URL_DO=DO_TOPIC&URL_
SECTION=-465.html
(11)
Voir : http://www.olats.org/fcm/artclimat/artclimat.php
(12)
Voir : http://www.bmoca.org/artist.php?id=74
(13)
Voir : http://www.ecoartsonline.org/
(14) Voir une liste de ces artistes à: http://stephan.barron.free.fr/technoromantisme/art_ecolo.html

2008-05-18

Vitesse et agitation


Alvin Toffler a compris, parmi les premiers, l’importance déterminante de cette nouvelle vitesse, de notre évolution, qui crée entre les générations un choc du futur (1) difficile à surmonter pour les générations âgées, dépourvues et comme aliénées par le surgissement des nouvelles mœurs et des nouvelles valeurs de l’après-guerre. Cette situation se répète et s’accentue actuellement avec le choc du numérique qui a renforcé cette aliénation et créé une sorte de fossé intergénérationnel entre les natifs et les immigrants du cybermonde (2). On évalue déjà à un milliard le nombre d’ordinateurs en activité sur notre planète, et à 3,3 milliards le nombre de téléphones cellulaires. En tenant compte que beaucoup d’usagers privilégiés en ont deux, voire trois, et en admettant que cette progression se poursuit, cela signifie que probablement un tiers de la planète a ou aura bientôt un ou plusieurs téléphones cellulaires. La vitesse de ces changements et la puissance de leur impact ne peuvent manquer d’avoir des conséquences considérables sur nos valeurs et nos comportements. Il nous faut donc introduire ici au cœur du processus de notre évolution, un concept qui a paru jusqu’à présent à beaucoup d’intellectuels insaisissable et trivial, voire haïssable, celui de la vitesse. Nous devons admettre que la vitesse a désormais statut de concept épistémologique, scientifique, sociologique, culturel, et bien sûr artistique (en art vidéo, musique, littérature, et dans les arts numériques). Autrement dit, dans l’hétérogénéité de notre cosmogonie impressionniste, nous devons prendre en considération non seulement les images instantanées de nos perceptions, comme le firent les peintres impressionnistes, mais aussi leurs transformations incessantes, leur instabilité, leur agitation constante, cette sorte de mouvement d’agitation brownienne, d’apparence aléatoire, que les physiciens ont détecté dans la matière et l’énergie, et qui devient la nouvelle métaphore de notre cosmogonie. Je veux dire par là que nous ne considérons pas la vitesse comme l’instauration de trajectoires linéaires, comme on pourrait évoquer une accélération de l’histoire hégélienne. Nous sommes plutôt confrontés â une vitesse-agitation , dont les arabesques s’entremêlent. C’est à coup sûr un concept très difficile à admettre et à opérer du point de vue épistémologique, car la vitesse et l’agitation détruisent les formes et les catégories sociales. Elles diluent les références stables, comme les classifications aristotéliciennes. Elles jettent le désordre dans la localisation de chaque élément, dans les relations qu’il entretient avec les autres, dans le positionnement social même de chacun de nous. Finalement, elles tendent à détruire le rationalisme classique, qui était basé sur une architecture stable comme une citadelle. On pourra juger que l’émergence de la vitesse dans notre univers familier apparaît comme un symptôme de crise de la connaissance et d’anarchie sociale, d’instabilité fatale et de perte d’identité. Certes, ce concept de vitesse-agitation nous secoue et nous inquiète. Mais nous devons admettre qu’il est désormais au cœur de notre réalité contemporaine et que cela exige que nous tentions d’en analyser les modes opérationnels et les conséquences. Le physicien américain David Nolte a étudié ce qu’il appelle «la nervosité de l’œil» et a même pu établir que nos perceptions visuelles à l’état brut sont agitées par ce mouvement brownien discontinu, et que c’est le cerveau qui les organise et les stabilise en les inscrivant dans des formes familières, qui nous permettent d’établir avec notre environnement une relation stable adaptée à notre action (3). L’usage de drogues, au contraire, peut bloquer ce formatage cérébral, de sorte que nos perceptions dansent dans un mouvement de vibration et de confusion totales. Il est permis de penser que nous avons tendance à recourir au même type de formatage, cette fois idéologique, face à l’hétérogénéité sociale, par réflexe sécuritaire ou par habitude. Cette réaction biologique et utilitariste ne conduit pas à nier le rôle de la vitesse dans notre cosmogonie impressionniste, mais au contraire nous aide à expliquer la nature de nos liens sociaux. Comme les pilotes de voitures de course, comme les pianistes, ou comme les enfants qui agitent leurs doigts sur les claviers des jeux vidéo, nous apprendrons à maîtriser la vitesse et à en tirer de nouveaux plaisirs et de nouvelles idées. La vitesse crée des frictions, des chocs, des peurs et de pertes de références. Mais elle crée aussi de nouvelles rencontres, de nouveaux liens, des hybridations, des fusions, et de nouveaux équilibres dynamiques.
Hervé Fischer
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(1) Alvin Toffler, Future Shock, Ramdon House, New York,1970

(2) Hervé Fischer, Le choc du numérique, édition vlb, Montréal, 2001

(3) David D. Nolte, Mind at Light Speed, The Free Press, New York, 2001.

2008-05-15

LA DIGITALIZACION DESCOLONIZADORA

escultura de un artista cubano *

Por cierto no hay que confundir progreso con desarrollo. En el caso de las tecnologías digitales, el progreso es cierto, ¿pero conllevará automáticamente a un desarrollo humano? No es una certitud. En un primer momento se constata ciertamente que la fractura digital aún concierne, a pesar de lo que se diga, al 85% de la población mundial y contribuye ampliamente a fortalecer el poder de los países desarrollados del Norte sobre las sociedades desposeídas del Sur. Pero en relación con el futuro, ¿será acaso una fatalidad? Por supuesto que no. Desde ya podemos observar que muchos organismos con fines humanitarios hacen uso de las tecnologías digitales como una poderosa herramienta de desarrollo, ya sea para denunciar las violaciones de los Derechos Humanos, consolidar las micro iniciativas económicas, o para la prevención y la educación. La digitalización ayuda también a las agrupaciones locales para comunicarse a través de internet cuando las infraestructuras de transporte son deficientes. He podido comprobar personalmente en África, en particular en Ruanda, en el caso de las redes femeninas, que intercambian de esta manera las informaciones y coordinan sus acciones en favor de las familias víctimas del genocidio.

Festival de cine pobre de Gibara

Acabo de participar en Cuba, en la pequeña ciudad periférica de Gibara, en el Festival de Cine Pobre, iniciado por el conocido realizador Humberto Solás, quien reúne a los productores y a los realizadores del cine de ficción, documentales y social de numerosos países, especialmente América Latina, que sólo disponen de presupuestos reducidos pero son capaces, gracias a la digitalización, de producir y de difundir. Allí me encontré también a representantes de los pueblos indígenas de Bolivia, Perú y Brasil, que ponen en manos de los grupos autóctonas las cámaras digitales para promover sus propias culturas. Incluso con recursos financieros mínimos, estas iniciativas permiten crear y hacer circular documentales de calidad. Es la virtud del cine digital. Sabemos que en África existen gestiones similares, realizadas especialmente con camionetas equipadas por el CNA (siglas en francés) el Cine Digital Ambulante. De igual manera, desde el 2004, el Office National du Film de Canadà lanzó el proyecto Wikiponi, llevado a cabo por la realizadora Manon Barbeau: jóvenes autóctonos producen documentales y corto metrajes de ficción sobre las culturas y la vida de los Attikameks y los Algonquinos. De esta manera hallan y revalorizan sus raíces identitarias.

En la Cumbre Mundial sobre la Sociedad de la Información en Ginebra del 2003 pudimos observar un abuso precisamente de la información durante la evocación del progreso extraordinariamente rápido que habrian hecho los países del Sur en relación a la utilización de las tecnologías digitales. Yo recuerdo las palabras de la primera ministra de Bangla Desh que pretendía hacernos creer que la población de ese país, pobre entre los pobres, disponía de un acceso cada vez mas generalizado de Internet. Recuerdo entre otros, un documental donde los pescadores senegaleses consultaban a través de Internet los cursos mundiales del precio del pescado en sus embarcaciones que los llevaban a los puertos donde iban a vender el producto de su captura en el mercado. Ya ni siquiera se oye hablar del Fondo de Solidaridad digital oficialmente lanzado en Ginebra en el 2005 en presencia de varios Jefes y Hombres de Estado por el Presidente Abdoulaye Wade, declarado « padre fundador de la Solidaridad Digital ».

Pero más allá de las gestiones simbólicas, gracias a internet, redes digitales de solidaridad se constituyen entre los organismos humanitarios, los grupos minoritarios , los autóctonos canadienses, chilenos, norteamericanos, etc. Modestamente, pero de manera evidente, los accesos a internet se multiplican en las zonas alejadas, en los poblados de adobe. Los animadores sociales, los maestros, los auxiliares médicos pueden presentar en pantallas de fortuna, los documentales en DVD que los ayudan a trabajar en la prevención y en la educación. Con las imágenes de video, pueden sobrepasar el obstáculo del analfabetismo. Además los grupos más activos establecen a través de internet intercambios regulares entre sí. De esta manera , Ivan Sanjinés, director boliviano del CEFREC, el Centro de Formación y Realización Cinematográfica, trabaja con la CLACCPI – Coordinadora Latina de Cine y Comunicación de los Pueblos Indígenas, con la AIDESEP, la Asociación Interétnica de Desarrollo de la Selva Peruana, así como con Mugarik Gabe, dirigida por Carlos Vásquez en Bilbao y con la Agencia Española de Cooperación Internacional para organizar encuentros internacionales. Gracias a la digitalización, y particularmente gracias a internet, las poblaciones amerindias pueden a partir de ahora producir no solamente su propio cine, sino también sus medios de información. Se trata de una etapa esencial en la lucha de estas sociedades marginadas por la colonización, para mantener vivas sus culturas, sus lenguas y sus identidades, y para hacer reconocer sus derechos fundamentales, tradicionalmente negados por los medios controlados por los poderes políticos y económicos centrales.

El digital "libertador"

Asistimos pues a las primeras iniciativas de una revolución político digital, que va a democratizar la información en general y permitir en particular a los grupos sociales minoritarios y periféricos que tomen la palabra en su nombre propio y que asuman su desarrollo en una dinámica de alternativa autónoma. Así, en Guatemala, Rigoberta Menchu, Premio Nobel de la Paz en 1992, lanzó el 23 de abril del 2008 un canal de televisión indígena, TV Maya, que emite en las 23 lenguas mayas. Este "canal-luz, voz e imagen de los pueblos mayas" sólo tiene tres emisiones al día. Y su presupuesto anual de lanzamiento limitado a $264 000$, no le permitiría existir sin las nuevas posibilidades que ofrecen las tecnologías digitales. Cine y TV pobre digitales permitirán a los pueblos colonizados retomar la palabra en su nombre propio. Paradójicamente, mientras que se veía que lo digital era un instrumento poderoso del neoliberalismo y de la globalización en el sentido americano, se podría pensar que la digitalización contribuirá a la descolonización y al desarrollo. Podemos esperar pues la emergencia de un nuevo mundo en 3D: Diversidad, Desarrollo, Descolonización. Dicho en inglés sintético, esto tiene más resonancia: Un mundo libre, en free D!
Hervé Fischer
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* Por favor he perdido su appellido. informame. hf

2008-05-13

The medium is the event


McLuhan was full of genius when he stated that “the medium is the message” (1) in a time when our humanistic tradition did not prepare us to understand the impact of technology onto our cognitive as much as social structures. As a matter of fact, it is easy to verify today that cell telephones or internet have become very powerful socialization’s tools, even when they transmit poor if not insignificant messages. Just think of chatting, or exchanges between young owners of cell telephones: Where are you? I am here. Me too. Let’s speak again later. (2) McLuhan’s intuition was provocative and meaningful in many aspects, but it was also too simple. And we have now to urgently revaluate the importance of contents, if we want to resist the alienating mass massage of mass media. We can’t afford neglecting any longer the importance of contents if we believe in the basic importance of rationalism and critical thinking.
media ecology

Meanwhile we have also experienced a new step of media ecology. Media ecology is a human science dedicated to the study of media environments. The Media Ecology Association has proposed the following definition: “the study of media environments, the idea that technology and techniques, modes of information and codes of communication, play a leading role in human affairs”. It seems to me also that the history and the social and political context of development of those media, the kind of users or public they tend to reach, and the sociological analysis of their contents are very relevant to explain their nature, their success or limits, and their evolution. Media ecology has been developed by Neil Postman in a Program of media at New York University in 1971. Marshall McLuhan is frequently quoted for having formulated the basic idea inspiring ecology of media: means arranging various media to help each other so they won't cancel each other out, to buttress one medium with another.

self media

We cannot any more consider exclusively mass media communications in a time when self media emerge as powerful alternative. We observe that they are even able to create mass media events. Cell telephones and digital cameras offer now miniaturized webcams able to register any incident occurring in the street which you may casually attend. And the file may be easily sent, even in real time, thanks to internet, to popular websites such as Youtube, where they get accessible to everybody. These self media give to ordinary citizens, without any professional training or link to chief editors, the possibility to register and transmit crucial amateur’s videos from an airplane crash, from a natural disaster, from an excessive reaction of police, from the moves and behaviours of a well known personality, from a demonstration or a riot in the street. These video may soon be accessible around the world thanks to the web, and even attract the attention of large broadcasting television programs.
Allow us to mention here a typical example. We have seen recently how young people in Montreal, Québec, being excited by the victory of their Canadian hockey team, have decided to celebrate abusively in the streets, by breaking down show windows of shops and setting police cars on fire. It seems that they got even more excited by the possibility of filming themselves in action with their cell telephones. And being probably proud of such a transgressive spectacle, they have transferred their video on Youtube, giving thus real time material to TV channels which were not there to retransmit images of the street disorders. They were probably not so much motivated by a sort of narcissism, than by the possibility to act as reporters of themselves and give oneself a mediatic importance. We may see it as revenge from frustrated young people suddenly encountering an opportunity to take their place in adult society where they feel marginalised, and getting thus social recognition of their existence. They got aware that new digital technologies were offering them the possibility to get important, by creating an event in which they were the main actors and suitable to be eventually broadcasted later on.
CNN is now broadcasting occasionally excerpts of Youtube's Citizennews Channel (3). They would see their images in the TV programs and big news papers, which usually don’t pay attention to them. And this digital promotion or exhibitionism in real time has become for sure part of their motivation to vandalize more and put more police cars on fire. Everybody has learned how to behave and smile for a photo. The codes are well known. But on that evening these young people have started more fires letting them hope better videos of themselves making the news for sure. The small cameras in their hands have finally made the event. I have often emphasized that digital technologies produce a psychotropic effect on those who escape from the heavy reality into the blue light of the cathodic screen. But this psychological effect of experiencing virtual spaces without gravity results also easily and rapidly into a counter effect onto real acts. In other words, we live now in a society of media and spectacle which results in a hybrid real-virtual world. You may act virtually in the real world and change it! These young sport amateurs became simultaneously film, news and event makers. They were acting inside the reality according to the needs of image producers.

media canibalism
Since 911 we know that terrorists also have learned how to produce the news. They are professionals trained in the use of internet. They have learned to behead a hostage in front of a camera. They are sure to obtain worldwide attention just putting such a video on internet. The destruction of the world trade center has been theatrically programmed like a Hollywood production with a delay between the attack of the two towers to allow camera men to be on site and time for the second impact and dramatic spectacle. Thus, they have obtained that professional TV reporters broadcast it worldwide in real time. The diffusion makes the event, more than the reality by itself.

Nowadays cameras multiply everywhere, waiting for something to happen. They are automatically in the right place at right time to create the event. Broadcasters will exploit their frames to amplify the event. We have to admit that mass media professionals are themselves waiting for something to broadcast. They sell news, therefore they need events. Eventually they create it. Of course, they look mainly for bad news which are selling much better! Sensationalism! God news is no news, no-event worth to be reported, because unable to catch the attention of telespectators or readers. Editorial staffs send reporters where something may eventually happen. And they are requested to report something able to make news. There is a need to nourish the media beast daily. Otherwise it will die from hunger immediately. Just think of the emptiness of the news on a bank holyday in summertime! Isn’t it terribly disappointing?
This law is bidirectional. The media is the event, and the event is the media. We may speak of real media cannibalism. The media never stop eating news. They gorge themselves of news. Of course such a statement may sound also too simple. But its provocative effect may be considered for a better understanding of today’s media.

self media and social control
We may even verify a second circularity of the phenomena. We are not only confronted to self media nourishing mass media, and ordinary anonymous citizens contributing spontaneously to the task of professional staffs of mass media, but we may also observe the emergence of a collective social self control based on self media. The night of victory of the Canadian hockey team in Montreal has prompted not only the delinquents to film themselves acting, not only policemen to register images with professional cameras, but also other ordinary people passing by and witnessing the disorders, to contribute to the mandate of the police. They had of course used their cell telephones to film the fires and acts of vandalism, a spectacle which they considered worth registering. It is not surprising then, that some of them, who disagreed with the violence, have spontaneously responded to the public call of the police on television to let see their video by the investigators in search of images allowing to the arrest delinquents and establish a proof of their involvement in vandalism. The new technologies may work as a kind of digital Panopticon (from the Greek, evocating a prison where the prisoners may be constantly watched without knowing it, so that they control their behaviour and limit their acts according to the fear that they may be seen). In fact, nowadays you never know if there is no webcam somewhere around, unseen from you, or somebody in position to film you with his cell telephone. We may even hope that this awareness may inspire more self control of people and less violence. A gangster or a policeman is never sure anymore not to be seen if he acts violently. We don’t fear anymore only Big Brother. We have also to take in account invasive Small Brothers possibly watching us and having the power to show us in broadcast diffusion or to denounce us to police authorities. This evolution of the media or information society may result more and more into a watch society, a cybersurveillance society, for the best and the worst.

Hervé Fischer
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(1) - Marshall McLuhan, Understanding Media: The Extension of Man, Toronto, 1964.
(2) - André H. Caron and Letizia Caronia, Moving Cultures: Mobile Communication in Everyday Life, McGill and Queen’s University Press, Canada, 2007.
(3) - Voir http://youtube.com/citizennews



2008-05-12

Facebook’s two Faces

Facebook has become an incredible success in Western countries, daily commented in the media. This platform of socialization is reaching now some 60 millions members in the world. Just in Canada 8 millions people have registered, which means one out of four Canadian citizens uses it. This digital innovation seems to answer an incredibly urgent social need. And this new phenomena tends now to extend even to China. A similar socialization site Xianoei, the so called Chinese Facebook, has raised $430 millions recently in funding from Softbank, according to a report from Venture Beat*. Facebook has also eventually tried to acquire another similar website in China, called Zhanzuo.com, which counts 7 millions users**.

The original idea inspiring these popular networking sites originated from the school’s albums of names and photos of the students of each class traditionally published yearly by English and American colleges and universities. But it has become much more powerful, when launched on line. Any user is invited to freely put his photo and name on the site, with his email address and to add personal information, such as his individual interests, the books he reads, the films he likes, his favourite sportive activities, and to include photos of his house, his family, his boyfriend, his pets, his holidays, etc. And of course, you should not forget to publish and update your curriculum vitae, supposed to attract also possible future employers. As such, Facebook looks mainly as a public virtual meeting place where you may be seen and contact friends. It gives also to many users a feeling of a higher level of existence and social recognition. Shortly said, it is a cyber public place for networking, public relations, social valorization and the hope of making friends. Not to be there looks like staying in the obscure shadow of today’s life, or paradoxically not really existing!

We cannot avoid questioning such behaviours and their incredible digital success from the psychological and sociological point of view. Should we conclude that so many people suffer of solitude in our mass societies? Is real communication getting so poor and rare now a days, that people need an artificial digital device to compensate their frustrations and anonymity? When people watch their page in Facebook and hope daily if not hourly for a click on their name, doest it mean that the traditional public places, squares, cafés, bars, discotheques, sport places, clubs, etc. have lost their efficiency and conviviality? We observe even a surprising addiction of young people, eager to visit constantly their Facebook pages and look for eventual visits. And this site is not any more just a place for students and younger. It becomes a kind of recognized social institution. Any singer, sportsman, political candidate, has to be there and to react to visitors, update, multiply his information, and seduce. Even humanitarian organizations, libraries, churches, big corporations think they have to register and promote themselves on Facebook. Will it become a place for a philosopher? For future Socrates to teach?

Of course, we cannot only consider this angel’s face of Facebook in its lashing financial success. Launched 2004 by Mark Zuckerberg, a student at Harvard University, this site reached already a turnover of 50 millions dollars in 2006, and may be worth now 15 billions dollars. Microsoft has bought a minority participation of 240 millions$ last October. Facebook has become the sixth most visited website worldwide with a frequentation far larger than in any other similar popular exchange website, such as well known MySpace, Yahoo, OpenSocial, Friendster, Windows Live Space, Youtube, etc.

Attracted by the huge amount of personal information collected spontaneously about so many people which has become now accessible on Facebook for anyone, many big corporations have considered using it for lifestyle analysis of possible clients, and for new marketing opportunities. They have seen the possibility of focussed promotion campaigns operating by personal emails. Coca-Cola, Microsoft, Sony, Blockbuster, Overstock and many others have become soon close and active partners with Facebook. And Mark Zuckerberg, listening of course to the siren song, has integrated in his site new automatic functionalities to facilitate this focused marketing. Maybe with a sense of self humour, he has given it the significant and trivial name of Bacon. By selling the personal profiles of its members to big corporations, Facebook could hope to generate high publicity incomes, and increase immediately its commercial value.

This evolution let appear in full light the other face of Facebook, which does not look anymore just as a friendly virtual networking place. Members discovered they ware trapped in a commercial disposal. Of course, many of them have protested and denied the right to be used that way, denouncing the commercial emails they were receiving. They have organized a protest, Moveon.org, and let circulate a petition requesting the respect of their privacy. The Electronic Privacy Information Centre has also publicly attacked the Beacon initiative, and all together they have obliged finally Facebook to move back. It has offered the possibility to those who want to remove their automatic agreement to the Bacon functionalities.

Just considering the Beacon story, one could say it was an abuse of power by Facebook, which has been corrected, and we should consider this misuse as an easy to understand commercial temptation for a young and ambitious entrepreneur, whom one had ingeniously considered as a gentle and stimulating social animator. But giving then more attention to the by-laws which are published in small letters on the website, one discovers surprising evidences of the obscure face of Facebook. By entering the website and giving one’s name and email address, one is considered automatically subscribing contractual obligations which are outrageous because they oppose directly to the fundamental civil rights. If you just take a chance of reading the contract (http//www.facebook.com/policy.php), – which nobody reads - you will discover the methods and spirit of Facebook, which declares:

- We may share your information with third parties, including responsible companies with which we have a relationship.

- We may use information about you that we collect from other sources, including but not limited to newspapers and Internet sources such as blogs, instant messaging services and other users of Facebook, to supplement your profile.

- By posting User Content to any part of the Site, you automatically grant (…) an irrevocable, perpetual, non-exclusive, transferable, fully paid, worldwide license (with the right to sublicense) and distribute such User Content for any purpose, commercial, advertising, or otherwise(…) (“Terms of use” de Facebook au 21/11/2007 www.facebook.com/terms/php).

- Facebook Beacon enables your brand or business to gain access to viral distribution within Facebook. Stories of a user’s engagement with your site may be displayed in his or her profile and in News Feed. These stories will act as a word-of-mouth promotion for your business and may be seen by friends who are also likely to be interested in your product.

Finally you have abandoned for ever your intellectual and moral property on any information you have put on Facebook. Facebook claims the right to use and exploit it the way it wants. You are not allowed to take it back from the site. And worse: Facebook states even the right to put additional information about you, taken from any other source it may consider, without asking your permission. Frankly such a contract is just outrageous. It is the worst example of the abuses of the Digital Far West, with no law, no sheriff, which the cyberspace may still evocate.

Hervé Fischer
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* Xinaoei was founded in December 2005 by Qinghua University graduates Wang Xing, Wang Huiwen, Lai Binqiang and Jacky, later on acquired by Oak Pacific Interactive in 2006 and announces now some 16 millions users. www.xiaonei.com

** Zhanzuo.com counts 7 millions registered users. It has been told that Facebook was ready to acquire it in November 2007 for $85 millions. It has not yet been confirmed.

2008-05-11

HYPEROBJECTS

The accelerating and invasive conquest of our human activities’ field by digital technologies surprises us unceasingly. It requests from us a fast adaptation, which brings a lot of stress, but also new excitements, and even addiction. Actually those individual reactions are nothing in comparison of the new ethical and democratic issues we have to face. Here are a few examples.

The objects of our daily life are more and more tagged with invisible meta data, indexed and wired into digital networks. We don’t refer only to cookies, to robots slaved to research engines, or to spyware which nest secretly in the programs and hard disks of our computers. I don’t mention only the bar codes which are everywhere on our manufactured products, readable on our personal bank accounts and medical files, and even used now to identify molecules in biotics. I don’t speak only of radio frequency identification devices (RFID), which are introduced into so many objects of daily use. I don’t just point out our GSP devices, which follows the movements of our cars, or our own changes of location, nor the satellites, which watch and register constantly images of our habitats and any visible modification on the surface of our planet. We could say that all these techniques provide mainly a passive remote cybersurveillance.

But let’s consider the next step which is on the move. We enter now an even larger and much more active digital invasion of our public and private spaces. It will happen for the best and for the worst, like any move ahead of CyberPrometheus. I don’t speak here only of the Bluetooth systems of wireless networks which link the objects point-to-point in relation with computers able to control not only printers or other peripherics of computers, but also the whole domotic management of a house, or a series of webcams and identification’s libraries. We discover that the financial crisis which rage in the US in relation with the abuses of mortgage credits and the so called subprimes, has given rise to an important commercialisation of remote spydevices. Of course the houses of owners unable to continue paying the mortgage don’t move and are easy to foreclose. But this situation has extended to car leasing. The financial institutions have discovered an efficient way to constrain their clients who fail to pay their monthly due amount. They install in the cars on loan a digital device which changes its green light to a flashing red one when time has come to pay, and which will even stop the car thanks to a distant signal given by the loan company, if the user don’t pay. As soon as he does it, he receives a pass word which he may enter on the keyboard of the device, and which will allow the engine to start again. Of course, for safety reasons, the system is programmed to give a series of warnings before stopping the car. And the GPS box of the car will eventually allow the lender to know where the car has been stopped and to get it back. This new market of digital control devices knows a fast expansion for the benefice of its manufacturers, such as Payteck in Ohio, or Sekurus International L.L.C, a leading payment protection and fleet telematics products and services provider based in California. Such corporations have already equipped some 250 000 cars and start selling on the car-rental markets of Asia, Europe and UAE. They may extend in the future to markets of professional printing or photocopy machines, or even domestic television sets, electric household appliances, refrigerators or dishwashers, and even sound, heating or air conditioned systems, and finally any electrical wireable object, which people are used to rent or buy on credit .

We may call hyperobjects all these objects which are wireless connected to digital networks and are therefore linked to remote control computers able to activate or stop them running and consequently to control their human end-users. In our consume societies, this new system of hyperobjects - an appellation enlarging the well known title of a book of French philosopher Jean Baudrillard* - will soon reach not only the manufactured equipments, but also the industries of contents and services. We observe already a fast generalization of smart chip cards programmed to pay services such as the use of the subway, of highways, of cell telephones, or TV connections. The users just need to reload the credit chip by internet transaction or cash payment. And we are getting about the same habits to access contents on line, such as software, music, films, archives, encyclopedias and any kind of digital commercial content. A few lines of program, introduced in any file on line and even of line in a DVD, allow to activate a time limitation, or to renew the access on line by entering a password which you get in exchange of a payment. The commercial system to which we are more and more bound and often agree with, is setting up efficient digital devices and programs on line linking objects, services and contents to remote powerful central control servers. Most of our usual objects, such as beds or tables, may have a chance to keep inert (although we may still imagine strange digital designs in the future). But an increasing number of daily objects will get smart and hyper, which means under remote control. We will have to adapt ourselves to this hybrid new nature of our environment: a mix of matter and digital.

The Far Digital

Of course, these changes will confront us also to a challenge which may seem every day more volatile and difficult to master. I speak from the necessary laws which may limit the inevitable abuses of such new powerful digital control technologies. We encounter a kind of new electronic horizon or frontier. How fast shall we be able to regulate this sort of virtual no man’s land which not only emerges but extends more and more and links us privately to it? Consumer protection groups watch; but they inevitably react slowly. They cannot perform as rapidly as the digital technology developers. We need a Lucky Lucke of the Far Digital, faster than its virtual shadow! I am not ready to sink under any digital paranoia. It seems to me that entering the age of the digital is even more fascinating that discovering the New world or sending men to the Moon (an exploit which would never have be possible without computing). I have no doubt that we shall adapt ourselves quickly. Just see how younger generations do! We should not forget that these new technologies did not fell from the sky suddenly, but that we are their inventors. We are the one who have programmed these powerful electronic machines, and go on programming and inventing algorithms. It is very creative part of our humanism.

Hervé Fischer

2008-05-09

Virtual science

digital logic into stem cells

The subjection of today’s science to computers and software has become a turn point in human history. Scientists investigate the invisible of the universe, translated into digital files; just think of remote astrophysics’ objects, or extremely small scale genes or biological processes, which you may calculate and see only on computer screens. Eyes and hands have lost their capabilities in scientific research. Once based on observation and manual experimentation, contemporary investigation models and programs its objects on the screens. It paradoxically follows a process of dematerialization, not dealing anymore with matter and energies, but mainly with data which have been translated into binary and fake colors codes to be seen and interpreted on the cathodic screens. And such a virtual science obtains an evident instrumental efficiency! Modern experimental science was manipulating electrons and magnetic fields. For now on, it is manipulating algorithms. Science is more and more dealing with hybrids of computing and life: for instance what we call bioinformatics, and what we could call astroinformatics, virtual genetics, etc. Contemporary sciences have no other choice than investigating, thinking and building their models with computers’ languages and computing. And reciprocally, we speak eventually of computer viral contamination. We investigate the world as if its creator had been a Great Computer Scientist. Such a dominant metaphor is not worse than interpreting the world in relation with spirits, as a living organism, or as a mechanism, such as a clock, as we did in the past. But let’s forget about God computing the world since its origin. And let’s better take in account the vision of our scientific researchers, who program and configure our worlds’ contemporary interpretation. They link, they imagine, they create the objects, which they investigate! Scientific laws may be compared with algorithms. Finally, we should speak today not only of scientific interpretation, but also of scientific programming, in the sense that we create computing objects, we generate digital files and program their behaviours and interactions not only to build our knowledge, but also to model the world itself.

Synthetic stem-cells

In the past, it was usual to state that we would never be able to artificially recreate life. Nevertheless, the very serious journal Science has announced in January 2008, that the Craig Venter Institute in Maryland (USA) has succeeded to create the synthetic genome of a bacterium. It is true that were recreating the Mycoplasma genitalium, the smallest one we know. But still, it was stated that this autonomous synthetic organism, is able to grow and reproduce itself. Can we legitimately speak of artificial life? Or of synthetic life? Or simply of life? Is there any difference? The scale of complexity between a bacterium and a human being appears for sure as a huge gap; but not as a radical one. Just as a difference of degree, not of nature. According to this step ahead, we may ask the question if digital science will once be able to create a synthetic human being, or at least a first human stem-cell, able to reproduce, multiply and give birth to a human being, the answer does not necessarily sound anymore definitively negative.
Synthetic cells may soon replace those famous stem-cells, and natural flesh tissues, bringing the long lasting ethical debate about the use of embryos to an end. But such a new step will immediately initiate again a new big social debate, which fascinates today’s artists and philosophers. The question is about the right of M. Craig Venter to obtain the intellectual propriety of its results and therefore life patents. This eventuality rises a series of radically new questions, including the possibility of genetic cut-and-paste. Virtual genetics open the way to eugenics, to producing replacement synthetic organs, to reactivating the DNA of dead animals and humans, to creating new species, chimeras, even androids used as slaves or soldiers, etc. Who will be in position to declare that such sideslips, erring ways, cheatings or madness will never happen? In the field of economics, it has become frequent to see computing used for creating fake accounts, for acrobatic speculation, introducing virtual amounts of money or shares which are mixed with real ones and work really, creating big confusion and financial bankrupts. We could quote here the scandals of Barings Bank in Hong Kong, of the huge corporation Enron in the US, of the bank Société Générale in France, and many other such examples of what I call iconomics - imaginary economics -, made possible by the power and flexibility of computing. It has become fully possible to create digital files of fake molecules or galaxies, which you may mix with “real ones” (those which we already know). Science has become technoscience, making impossible to separate science from its computing technologies and algorithms. We have not forgotten the scandal of a leading South-Korean investigator who had modified digitally its results to announce important discoveries in the field of stem-cells (2006). But can we be sure that we always may detect rapidly enough such misconducts? Are we sure that these frauds will always finally be harmless, never getting instrumental onto reality? We may be confronted to serious challenges or dangerous viral blackmail in the future.

Modeling the world in laboratory/computer

It is not surprising therefore that contemporary artists get fascinated by the imagination and creative power of such new possibilities. Artificial intelligence, memory and life have become central themes for scientific arts, especially in bioart. If once in the future, not so far ahead now, men are getting able to create some kind of synthetic or artificial life forms in their laboratories/computers, it may be the beginning of a vertiginous anthropological revolution. Thanks to digital technologies and its powers, science is today getting more imaginative and creative than art. The human species may become the avant-garde brain and engine of the evolution of life. Such an idea may seem as meaningful as the Copernic revolution in the past, as radical but more excessive, dealing this time not only with human modesty, but with ambitious self-awareness, not anymore with astronomy, but with biology and life. God is dead, said the western philosopher Nietzsche. Well! Let’s agree, But for now on, we may think that humanity is becoming the creator of itself. The question is: can we trust the wisdom of mankind developing such a fabulous digital imagination? How shall we control eventual mad science or scientific possible criminality?
Hervé Fischer
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* Electricial engineer Ron Weiss, whose background is in computer science, has been collaborating with biologists to program digital logic into stem cells. The goal is to enable the cells to “fix” disease. (photo by Denise Applewhite)

2008-05-08

The urgence of improving the networks' governance

internet mapping
Infrastructures have always been the base of economical as much as cultural developments. Just let’s think of rivers, roads, railways, aviation or telephone. Today's information society is depending on internet. Not only we have to multiply these digital highways, but we have to adapt them to the needs of massive expanding communication exchanges and heavy files transit (complex software, 3D imaging, cinema, real time interactivity, etc.). We even dream of a 3D Web technology. Google is offering us 3D images of our cities, and even 3D modeling of the earth and oceans.
Numerous real time massive multiplayers 3D videogames, distribution of fiature films, scientific 3D imaging,
distant robotic surgeries, all of them on line multiplying simultaneously will need more and more bandwidth. We cannot keep such heavy digital trucks on instable earth paths. We will be obliged also to better manage these highways, and even charge tolls according to speed, weight and priorities of the circulating files. Underestimating the importance of extending and improving the new structures and the servers they need, could soon be a main obstacle to economical development, to trade, professional services, education, etc. Each country needs therefore also to train experts in networking architecture and managing. Maintenance and protection become basic strategic issues in a world of intense exchanges of all kind, industrial competition and spying, hacking, terrorism and cyber attacks. No country can afford to encounter sensible data burglaries, digital breakdowns, highways hold-ups and cybercriminality. Not to speak of invisible but powerful worms and virus, and of the catastrophic invasion of junk and spam messages. We should not forget that today’s firewalls are more vulnerable than the Great Wall in its time! Using a metaphor, we could say that the good maintenance of the digital fluxes gets as important for a country as the blood health and circulation for a human body. And it is the responsibility of the states and to build these highways, to manage them in the general interest and to secure them under the auspicies of an international governance.
We meet already a series of difficult challenges. The rapid worldwide success of digital communication puts our internet networks at risk. Experts underline that we are overloading the web, at such a point that we urge to invent and develop a new conception and architecture for it. Otherwise we may be soon confronted to a digital chaos. Telephonic communications will get more and more exclusively digital, and request real time voice exchanges. The rapid tempo of our lives has changed our habits and demands. Time is money. And we request our exchanges of textual messages and data files to be just in time. We cannot accept anymore that our computers and networks be slow. This accelerating social time of today requesting the speed of lighton internet seems to us a basic need. Just imagine if trains or planes should arrive to destination in the second they leave! Only teletransportation in science-fiction makes it possible. Nevertheless we demand it from the internet! Its fluidity and speed must surmount the inevitable traffic jam of digital rush hours.
We are confronted to the necessity not only of improving the digital roads, but also to lighten the circulating vehicles. It means that we have to limit the size of overloaded files by fragmenting them (streaming) and being able to readjust the fragments correctly then they arrive to destination. Compression of the files will not be enough. Dreaming of 3D Web, we have to improve the traditional 3D modeling with its numerous polygons and set up a light new 3D programming. Many developers reach the point of revolutionizing this technology. Lets think for instance to the 3D cyberactors of the Quebec small company named Darwin Dimension*.
A two hours feature film based on the traditional 24 frames per second will finally count with some 172 800 frames. It means a very long and heavy train of vehicles, resulting monstrous for any internet diffusion. A digital film transportation must therefore only take in account the reference frames and the series of little changes from one frame to the next.
Still we have to manage the circulation of the vehicles and direct them through each server of the network according to their addresses, which are tagged to each of one. This is a huge traffic control task! (Just think of the thousands of daily miss directed luggage in the airports.)
The complexity of these challenges looks very sensible, just considering the vital role of digital networks in today’s human activities. We cannot afford any big netcrash, those consequences in our security would be like an earthquake.
According to such basic considerable risks, we need an international institution like the International Telecommunication Union, the leading United Nations agency for information and communication Technologies headquartered in Geneva, being responsible for the international standardization, global maintenance, security, and technological fast improvement of the digital networks. The importance of its role looks equivalent to mandate of the International Civil Aviation Organization (ICAO) based in Montreal, for air transportation roads and security. We also need that the Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN) be transferred from its American controlled NGO to a neutral institution with shared international responsability. It seems that the digital technologies development has stretched out faster than human governance. Is it not very dangerous? Time has come to urge an international political awareness of our responsibilities.

Hervé Fischer

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*Darwin Dimension: http://newsblaze.com/story/2006072406003700011.mwir/topstory.html

2008-05-05

Le système des hyperobjets


L’accélération du choc du numérique ne cesse de nous surprendre et d’exiger de nous une adaptation, que les uns jugent stressante, et les autres excitante. Mais ces humeurs demeurent bien anecdotiques face aux enjeux démocratiques et éthiques que soulèvent ces nouveaux défis. En voici un nouvel exemple.

De la veille passive…

Notre environnement réel et quotidien est de plus en plus tagé et indexé par des réseaux numériques qui relient ses objets point à point, et leurs attribuent des métadonnées non visibles è l’œil nu. Je ne me réfère pas ici seulement aux cookies, aux robots informatiques des moteurs de recherche, ou aux logiciels espions, qui truffent nos logiciels et les disques durs de nos ordinateurs. Je ne parle pas seulement des codes barres omniprésents sur nos objets manufacturés, voire sur nos dossiers bancaires ou médicaux. Je ne limite pas davantage mon propos aux puces d’identification par radiofréquence RFID qui sont insérées dans de nombreux objets de consommation, voire dans des bracelets ou sous l’épiderme d’animaux ou d’êtres humains. Je n’évoque pas seulement nos cartes de crédit, nos cartes à puces, et nos téléphones cellulaires qui permettent de suivre et d’enregistrer pas à pas tous nos gestes, nos déplacements, voire nos messages. Je ne mentionne pas seulement nos GPS qui suivent constamment les déplacements de nos véhicules ou de nous-mêmes, ni les satellites qui enregistrent des images de nos habitats et repèrent tout changement visible de notre colonisation de la planète. On pourrait qualifier cette première phase de numérisation de notre milieu de vie de veille passive. Préparons-nous à la suite.

… au contrôle actif

Car nous entrons manifestement dans une deuxième phase plus active de cette invasion numérique de notre espace privé aussi bien que public, pour le meilleur et pour le pire, comme à chaque avancée de CyberProméthée. Je ne parle pas seulement des systèmes Bluetooth de réseaux sans fil qui relient des objets entre eux à partir d’ordinateurs qui contrôlent donc la domotique d’une maison, aussi bien que nos imprimantes et nos webcams. La crise financière qui sévit actuellement aux États-unis, notamment à la suite des abus de crédit hypothécaire, dite des subprimes, a favorisé la commercialisation de mouchards électroniques d’usage courant. Certes, les maisons dont les propriétaires ne sont plus capables de rembourser les hypothèques ne bougent pas de leurs fondations et sont donc facilement récupérables par les prêteurs. Mais le mal s’est étendu aux automobiles. Pour contraindre les clients à payer leurs mensualités, et pour récupérer éventuellement les voitures dont les baux ne sont plus honorés, les compagnies de financement installent désormais sur les voitures des mouchards qui clignotent lorsque la date mensuelle du payement approche. Et si le client ne satisfait pas à ses obligations, les services financiers peuvent envoyer à distance un signal informatique qui provoquera tout simplement l’arrêt du véhicule. Dès qu’il a payé, le client reçoit un code qu’il peut entrer sur le clavier du mouchard, et qui lui permet de redémarrer. Si non, la localisation du véhicule par GPS permettra à la société de récupérer l’auto. Bien sûr, pour ne pas créer de danger, le dispositif fonctionne selon plusieurs avertissements préalables pendant 48 heures avant l’immobilisation du véhicule. C’est un marché en pleine expansion pour des sociétés comme Payteck de l’Ohio, ou Sekurus en Californie, qui a équipé quelques 250 0000 autos. Ces sociétés, en pleine expansion, exportent désormais leurs systèmes en Chine, en Europe et au Moyen-Orient. Car l’efficacité de ces petits dispositifs incontournables peut s’appliquer non seulement aux automobiles, mais aussi aux photocopieuses, et demain à nos équipements de cuisine – réfrigérateur, machine à laver, etc. -, à nos téléviseurs, à nos systèmes de son, de chauffage ou de climatisation, bref à tout ce qui s’achète fréquemment à crédit et qui fonctionne à l’électricité.

Nous appellerons donc hyperobjets, tous ces équipements qui peuvent désormais être reliés par les réseaux numériques câblés et sans fil à des serveurs centraux, véritables boîtes noires de contrôle de l’usage des objets et donc de leurs utilisateurs – nous-mêmes. Dans nos sociétés de consommation, ce nouveau système des hyperobjets – pour élargir le titre d’un livre bien connu de Jean Baudrillard* - touchera bientôt non seulement l’industrie des équipements, comme les voitures, mais aussi des contenus et des services. Déjà se généralisent les cartes dont on doit recharger le crédit, pour le métro, pour les péages d’autoroute, pour les téléphones cellulaires, mais aussi pour une connexion satellitaire de télévision. Et les contenus n’y échapperont pas non plus : les fichiers numériques des logiciels, des films, de la musique et de tout ce que l’on peut charger sur l’internet vont comporter quelques lignes de programmation supplémentaires, qui permettront d’y inclure une date de péremption ou d’en renouveler à distance la jouissance avec une carte de crédit. Le système de consommation auquel nous nous soumettons de plus en plus met ainsi en place ses structures numériques de contrôle commercial. La majorité de nos objets quotidiens – nos lits, nos tables – ont quelques chances de demeurer inertes (et encore, bien des objets-fiction sont imaginables!), mais un nombre croissant de nos objets d’usage courant vont devenir hyper : sous contrôle à distance. Nous allons devoir nous adapter à l’hybridité qui s’annonce, celle de la matière et du numérique.

Le Far Digital

Bien entendu, ces changements nous confrontent aussi au défi, qui semble chaque fois plus volatile, difficile à saisir et à relever, de l’encadrement législatif qui s’impose face à tous les abus que permet le développement de cette nouvelle frontière électronique. À quel rythme et jusqu’à quel point allons-nous être capable de réguler ce no man’s land numérique qui émerge chaque jour davantage autour de nous? Les Groupes de consommateurs veillent aussi, mais ils ont inévitablement la gâchette moins rapide que les développeurs de technologies! Il nous faudrait un Lucky Luke du Far Digital.
Et je ne tomberai pas dans la maladie chronique de la paranoïa numérique. L’entrée dans l’âge du numérique est encore plus fascinante que la découverte du Nouveau monde ou que l’exploit du premier homme sur la Lune (qui en est d’ailleurs l’une des manifestations les plus marquantes). Et nous nous adapterons certainement. On tend curieusement à oublier, lorsqu’on s’inquiète, que ce n’est pas un sorcier ou un démon, mais nous-mêmes qui avons inventé l’informatique, et qui en détenons les codes sources et les algorithmes.
Hervé Fischer

* Jean Baudrillard : Le système des objets, Gallimard, 1968.